Faust, l'une des dernières créations du metteur en scène Frank Castorf à la Volksbühne, s'inscrit dans un contexte tout à fait singulier. Alors que la mairie de Berlin a annoncé le remplacement du directeur de l'institution dont il avait réussi, depuis 1992, à faire un théâtre d'avant-garde provocateur à la réputation internationale, une vive controverse éclate autour de son remplaçant Chris Dercon, curateur, vite accusé de dévoyer l'héritage castorfien. Assimilé à la gentrification en cours dans la capitale allemande, Dercon se voit reproché de vouloir faire de la Volskbühne une plateforme mondialisée d'un art aseptisé. L'objet de cette communication est d'observer comment la mise en scène de Faust se présente comme une réponse artistique à ce contexte de production. En effet, s'y déploie un véritable anti-internationalisme qui renvoie dos-à-dos les utopies mondiales du communisme et du libéralisme, au sein d'une dramaturgie complexe où l'oeuvre goethéenne devient le support d'enjeux plus politiques que métaphysiques. Aussi le spectacle est-il une occasion pour Castorf de réaffirmer les préoccupations au coeur de son projet artistique: proposer un théâtre "local" non pas refermé sur lui-même, mais ouvert aux conflictualités multiples du monde.