Agnès de Jésus, dominicaine au couvent de Langeac près du Puy, décède en 1634 âgée de trente-deux ans 1. Dans la Vie qui paraît trente ans après son décès 2 , le sang est abondamment présent, qu'il s'agisse de mortifications violentes ou de grâces extraordinaires, comme la participation sanglante à la crucifixion, ou la dévotion sacrificielle aux plaies du Christ. Michel de Certeau notait qu'au XVII e siècle les « saints » en attente, ceux et celles qui ne sont pas encore passés par la procédure canonique et qui sans doute n'y atteindront jamais, ont laissé ou suscité quantité de récits de « "singularités" physiologiques (plaies, incisions, perte de sang, enflures, lévitations, distorsions physiques) », que la curiosité des témoins et biographes ont recueillis dans ce que l'historien appelait une « dramaturgie corporelle de la société » composant un « théâtre de la cruauté » 3. Ajoutons qu'avec cette Vie, nous sommes face au stéréotype majeur de la sainteté des femmes dont les pratiques actualisent littéralement 1 Prononcée lors du colloque Le sang, siège de l'âme organisé en juin 2018 par Corinne Lucas Fiorato et Elisabeth Belmas cette communication a été remaniée un mois après le décès de Jacques Le Brun emporté par le COVID 19 le 6 avril 2020. Grand historien des spiritualités religieuses de l'époque moderne et tout particulièrement des biographies de religieuses, il a nourri ce travail qui lui est dédié.